J'en parle ailleurs, il y a une singularité concernant les catholiques romains, ils font une chose qui va contre leur religion, que font aussi les orthodoxes iconodules, si du moins il y en a d'autres, je m'y perds dans les méandres des si nombreuses sectes chrétiennes, donc, une chose curieuse, ils représentent la figure de leur dieu. Censément, ils sont opposés à cela, si j'ai bien compris ce sont plus ou moins des juifs et si j'ai bien compris les juifs ont dans leurs dogmes l'interdit de la représentation de leur dieu. De l'autre bord, ces textes sont pleins de dogmes contradictoires, si au milieu du VIII° siècle les églises chrétiennes ont convenu dans leur majorité que les icônes étaient licites, voire recommandées, ça doit se trouver quelque par dans les textes. Mais les chrétiens proprement dits ont leurs propres textes, refusés par les autres sectes juives, et si j'ai bien compris on y renouvelle l'interdiction des représentations de leur dieu. N'étant pas trop versé dans l'exégèse des textes admis par les sectateurs juifs, quelle que soit leur secte ou leur obédience, je ne jurerai de rien. Malgré tout, ça demeure une question apparemment difficile à trancher qui reste encore un sujet de débat, encore récemment, dans les années 1920 et 1930 ce fut, entre autres questions, un motif de schisme parmi les sectes réformées, entre autres les diverses branches adventistes. Bon, les adventistes ne sont pas le meilleur exemple, avec leur mélange de sources parfois contradictoires. Passons...

Ce n'est pas tant la question de la représentation du dieu, en fait la première et plus constante durant les premiers siècles du christianisme est fidèle à la symbolique israélite, une main qui bénit, en général trois doigts ouverts, pouce, index et majeur, les deux autres repliés, mais pas toujours. Cela dit, la main comme représentation divine précède toutes les sectes judaïques même si les juifs et les musulmans l'ont “naturalisée”, spécialement sous la forme de la main de fatma ou khamsa. Non, ce qui m'intrigue vraiment est le développement de la représentation humaine du dieu sous les aspects d'un personnage barbu. Dans les premiers temps, fin XI° ou début XII° siècle, la relation est moins nette, mais assez vite la reprise de la symbolique complète s'impose, grande barbe, couronne de laurier, toge, bâton à la main droite, sphère ou disque à la main gauche, trône : Jupiter.

Gilgamesh toujours parmi nous !

Je prends l'exemple des croyances parce que c'est le plus universellement visible ou lisible, où il y eut des humains il y a des représentations de, disons, divinités ou des discours sur elles depuis au moins sept millénaires et de manière certaine depuis cinq millénaires. Mais ce qui m'intéresse ici est la persistance des croyances : quelle qu'elle soit, quelque ancienne soit-elle, ce jour il y a encore des adeptes. J'ai un précepte concernant la langue, tout ce qui a été donné comme vrai est vrai, j'ai un précepte aussi concernant les concepts, tout ce qui a été pensé ou imaginé un jour existe aujourd'hui. Bien sûr, à condition que la personne qui a eu ce concept l'ait partagé. C'est moins vrai que le premier précepte, qui lui non plus n'est pas absolu, il peut arriver qu'un récit disparaisse et que même ses traces s'effacent, il peut arriver qu'un concept se diffuse trop peu et que ceux qui le mémorisèrent meurent sans le transmettre, mais du moins, quand un récit ou un concept diffuse assez, ils restent. Même si l'on ne sait plus rien ou presque du récit ou du concept originaux, ça ne les empêche pas de continuer de vivre dans la mémoire des humains. Pour exemple, ceux qu'on a pris l'habitude de nommer les présocratiques, un nom imbécile d'ailleurs puisque la relation est inverse, Socrate découle, disons, des philosophes archaïques et non ces philosophes de Socrate. En même temps, ça rend compte d'un phénomène courant, nommé par je ne sais plus quel membre de l'Oulipo le « plagiat par anticipation » : pour des raisons historiques et idéologiques on date la naissance de la philosophie de l'œuvre de Platon, dont le personnage principal de ses apologues, récits, comédies et contes est nommé Socrate, donc tout ce qui précède est « pré-philosophique ».

Les présocratiques donc. Soit précisé, malgré une forme un peu trop personnelle (que j'apprécie pour son caractère enlevé et ironique mais assez éloigné des standards de Wikipédia) l'article mis en lien donne une bonne image de ces auteurs, de leur place dans la naissance de la philosophie et de leur influence ultérieure. L'intérêt avec ces penseurs est le fait que même quand ils n'ont laissé aucune trace directe, aucun texte écrit de leur vivant par eux-mêmes ou par des disciples, on a une connaissance parfois étendue de leur doctrine et de leurs concepts, cas par exemple d'Anaximandre qu'on ne connaît qu'indirectement, bien que, nous dit son article, il soit probablement « le premier philosophe à avoir consigné ses travaux par écrit », le plus ancien auteur qui parle de lui et de son œuvre, Hérodote, étant né environ 70 ans après sa mort. Il en va de même de plusieurs autres de ces penseurs, souvent fondateurs ou continuateurs d'écoles. Ils ont tous une même particularité, ce sont des colons, c'est-à-dire originaires des colonies fondées lors de la seconde vague d'expansion des peuples qui s'installèrent dans plusieurs régions de la partie la plus méridionale des Balkans entre -2000 et -1800, essentiellement dans ce qui constitue la Grèce actuelle, et qui contribuera justement à former l'ensemble culturel qui constituera la civilisation grecque un millénaire plus tard. Je ne compte pas faire ici l'Histoire de cette civilisation, il suffit de dire que la Grèce antique est le fruit de l'acculturation réciproque de trois ensembles, des peuples indo-européens venant du nord, des peuples probablement rattachés aux peuples chamito-sémitiques venant du sud-est et des peuples plus anciennement installés, « locaux » au sens où ils sont là au moins un millénaire avant l'arrivée des deux autres ensembles.

Ne m'étant pas trop documenté sur cette source des futurs Grecs, je ne peux pas dire grand chose des groupes du sud-est, disons, les “Sémites”, ni des locaux, par contre j'ai mon idée sur les Indo-européens, les “Achéens”, dans le texte « Cette Histoire que l'on se raconte... » j'expose une modélisation des types d'expansion des sociétés humaines, en dessinant deux grands types, celui “viral” et celui “bactérien”1. On peut supposer que l'arrivée des Achéens est consécutive à la division d'un ensemble assez important en population, une société de type bactérien, probablement sous forme de fédération, qui pour une raisons que j'ignore, peut-être une décision volontaire, peut-être une contrainte, probablement un peu des deux avec probablement une dominante de contrainte, entreprend une migration de masse en au moins trois directions, peut-être quatre ou cinq. Observant l'installation de peuples indo-européens au cours du temps, on peut constater l'installation contemporaine de plusieurs d'entre eux à cette période, entre -2000 et -1800, vers l'est (principalement dans l'Iran actuel), vers le nord-ouest (Celtes, proto-Germains) et vers le sud-ouest (Balkans, nord de l'Asie Mineure). L'indice que ce serait une dispersion par division est le fait justement qu'il s'agit de populations assez nombreuses qui, dans leurs premières implantations, tendent à remplacer les populations locales en les absorbant ou en les éliminant. C'est moins le cas bien sûr aux limites de leur expansion, pour au moins deux raisons : comme une partie de ces populations se fixe dans les premiers établissement, ceux qui continuent leur progression sont moins nombreux, et aussi, plus ils avancent et plus ils se rapprochent des côtes, et aux époques proto-historiques comme aujourd'hui, les humains tendent à s'assembler sur les côtes, du fait, moins de conquérants et plus de locaux, moindre mainmise des nouveaux arrivants.

Les colonies dont viennent les philosophes “archaïques” correspondent plutôt à l'expansion par bourgeonnement. Lors du processus de consolidation de la civilisation grecque émergente, entre -1200 et -800 environ, des groupes essaiment un peu partout en Méditerranée, au sud-ouest de l'Asie Mineure, au sud de l'Italie et de la France, probablement en Afrique du Nord et sur la façade est de la Péninsule ibérique, là aussi je ne suis guère documenté, en tous les cas m'intéressent avant tout les colonies ioniennes d'Asie Mineure et italiques de la Grande-Grèce (Sicile et sud de la botte italique). Dans cette phase, les colons sont moins des conquérants que des commerçants et pour s'installer, font alliance avec les populations locales. On peut postuler qu'une cause principale de l'apparition de cette manière de penser nouvelle est directement liée à ce melting-pot ou de cette “créolisation” (cela dit, la phase précédente est aussi un processus de créolisation, mais différent). À dire vrai, cette analyse est d'une grande évidence, c'est un processus constant, lisible pour les époques les plus anciennes, préhistoriques et proto-historiques anciennes, explicite pour celles les plus récentes, proto-historiques récentes et historiques : chaque société connaît des cycles, d'une temporalité à-peu-près prévisible et d'une forme constante, chaque cycle connaissant trois phases principales, deux secondaires et une ultime/initiale, puisque la fin d'un cycle est le début de la suivante. Il y a aussi ce qu'on peut nommer des inter-phases qui sont les moments où se prépare ce qu'on peut nommer la conversion qui fait basculer d'une phase à la suivante, et où se réalise cette conversion.

Ici comme dans d'autres pages j'utilise le concept de conversion mais il faut s'entendre, ce ne sont pas les acceptions psychologique ou religieuse ou idéologique, même si ça en tient compte, il s'agit de l'acception de base telle que donnée par le TLF, « Changement, par retournement, du sens d'un mouvement en cours », mais aussi de celle propre à la mécanique, « Point autour duquel un corps tourne ou tend à tourner en décrivant une courbe », comme qui dirait, une “révolution”, ou cette autre acception générale, « Action de changer une chose en une autre », notamment la transformation de l'énergie en matière ou l'inverse, enfin ça peut aussi être l'acception financière de “conversion d'emprunts”, « Opération consistant à remplacer une dette publique (rente, emprunts) portant un certain intérêt par une autre produisant un intérêt moindre », ça peut même aller jusqu'à établir un intérêt négatif, bref, transformer une dépense en recette. Sans les accabler, les approches psychologiques, religieuses et idéologiques de la conversion sont limitées et pauvres, et n'en voit que le début, la fin ou l'apparence.

Application concrète : entre, en gros, 1920 et 1965 il s'est développé une série d'inventions, effectives, théoriques et conceptuelles, qui ont préparé la réalisation d'une toute nouvelle manière de communiquer. Pour me citer,
Selon moi, la date de fin est 1962, lors du lancement du premier satellite de télécommunication, qui bien sûr est aussi une date de début, mais ça n'a jamais cette précision, disons qu'il y a des marqueurs d'une transformation irréversible mais que le sentiment de cette irréversibilité est, selon les individus, un peu antérieure ou beaucoup postérieure, ici les plus sensibles aux changements anticipent la chose vers le milieu des années 1950, quand il devient clair que l'envoi d'objets dans l'espace sur une orbite géostationnaire est imminent, pour les moins sensibles, et bien, il ne savent pas encore que cette conversion est déjà réalisée. On peut dire que les moins sensibles croient que la conversion à venir sera celle qui a déjà eu lieu.

Une fois ces éléments disponibles, cette réalisation alla assez vite et alentour de 1985 tout était en place. La dernière étape est bien sûr la conversion de la société, un processus qui peut parfois être assez long et qui se révèle souvent incomplet, dirai-je même, imparfait.

Le problème de base est celui du titre de cette partie : Gilgamesh est parmi nous, mais aussi Ishtar, et Quetzalcóatl, et Jésus, et Bouddha, et Marx, et Machiavel, et le Petit Lutin Vert, et Sherlock Holmes, et Jules César, et Confucius, et Jupiter, et Freud et... Bref, tout être réel ou fictif qui est l'image, le symbole d'une capacité de conversion, reste vivant pour les adeptes de cette forme spécifique de conversion. Ça peut être symbolique mais ça peut aussi être littéral, je ne pense pas que les freudiens croient que Freud est réellement vivant (quoique je soupçonne certains analysants, et même certains analystes, de le croire ou de ne pas en être loin, par exemple l'adhésion au concept de métempsycose n'est pas si rare dans les sociétés censément rationalistes2), par contre, et pour compléter la note précédente, si on est Tibétain, bouddhiste et traditionaliste, le Dalaï-lama est bel et bien le dernier en date d'une longue série de réincarnations, ou pour une autre forme de, disons, croyance, certains chiites croient littéralement à l'existence de “l'imam caché”, ou certains chrétiens sont certains que Jésus va revenir, voire qu'il est revenu et parmi nous. Ou de même, l'adhérent naïf au marxisme en version lénino-stalinienne, celui au libéralisme en version hayékienne, sont sincèrement persuadés que la stricte application de leur doctrine établira la Société Parfaite. Autre cas, le fascisme strict, celui inventé en Italie entre en gros 1870 et 1920, et réalisé en 1922-1923, est conçu au départ comme une restauration de la République romaine antique, et le nazisme, dont le développement est à-peu-près contemporain (selon moi, il y a un léger décalage, il s'élabore plutôt entre 1885 et 1930), au-delà du salmigondis idéologique qui le constitue, est la restauration fantasmatique du Saint-Empire romain germanique, mais sans la sainteté (sans le christianisme3).

Mon Histoire n'est pas ton Histoire.

Je ne compte pas trop discuter de cette histoire (sans majuscule) de conversion, un fait est un fait, soit mes lectrices et lecteurs en comprennent le principe, soit non, dans le premier cas je n'ai pas besoin de détailler, dans le second, et bien, je pourrai détailler autant que je le peux que ça ne changera rien. Prenons un cas dans mon actualité, la séquence démarrée il y a environ deux ans. Tout ça part de loin, en gros la seconde moitié du XIX° siècle. Bien sûr, c'est la suite d'une séquence beaucoup plus longue mais du moins, dans sa composition actuelle le socle en a été élaboré alentour de 1870, s'est concrétisé entre 1915 et 19304. Dans la configuration actuelle pour la France, on a un modèle de répartition des principaux groupes s'articulant sur un axe gauche-droite, avec deux groupes extrêmes, deux groupes intermédiaires, un groupe central ou moyen, enfin un groupe « désaxé », qui ne forme pas vraiment un groupe, disons, l'ensemble des groupes qui ne s'identifient à aucun des cinq groupes identifiables ni ne se reconnaissent dans l'axe gauche-droite tel que déterminé par ces groupes. Ce qui ne signifie pas qu'ils ne se considèrent pas “de gauche” ou “de droite”, pour prendre un exemple concret, je ne m'identifie à aucun des cinq groupes en question ni ne me reconnais dans l'axe qu'ils déterminent mais je me suppose tout de même “de gauche” tout en sachant que ça n'a pas trop de sens, c'est plus une question d'orientation que proprement de position, de fait je suis comme tout le monde, plutôt moyen (un “citoyen moyen”, ordinaire) mais “je penche à gauche”, je partage formellement les dogmes essentiels qui déterminent “la gauche” mais dans les faits, et bien, je fais selon les circonstances en tendant à faire mes choix quand ils me semblent me diriger “vers la gauche”.

Dans le contexte actuel, on a pu voir que, selon les circonstances, une part importante de la population française, en tout cas supérieure à 40% des personnes en état de donner leur avis sur la question, a des problèmes avec ce positionnement latéral. Compte tenu des citoyens qui ne se sont pas donné les moyens de donner leur avis, le plancher réel est d'environ 50%. Pour le dernier moment de la séquence, il avoisine les 60% de personnes en état de s'exprimer, approche les 65% de plafond réel. C'est indicatif : quand une majorité des citoyens d'un pays ne se sentent pas concernés par le choix de ses représentants, et bien, ça signifie qu'ils ne sont pas les représentants de cette société.

Donc, la séquence récente d'environ deux ans. Il y eut auparavant une séquence assez longue, environ trente ans, pour bien délimiter les groupes. En 2012 ils sont définis même si encore appelés à évoluer mais surtout pour mieux les dessiner. en 2015, on se trouve avec un clair problème, la droite et la gauche “non extrêmes” se divisent comme jamais depuis plus d'un demi-siècle, et très différemment : jusqu'au début des années 1980 cette division existait mais s'incarnait dans quatre partis, droite et gauche réformistes, droite conservatrice et gauche révolutionnaire. Entre 1985 et 2005 environ, deux tendances vont perdre leur autonomie ou être marginalisées et l'on aura la domination électorale, à droite du parti conservateur, à gauche de celui réformiste. Entre 2005 et 2015, d'une part se reconstituent ou s'affirment les pôles extrêmes, de l'autre apparaît clairement la tension interne des partis dits de gouvernement, leurs « pôles naturels » se clivent, avec ce problème, les extrêmes ont profité du faux unanimisme des partis intermédiaires pour « occuper le terrain » dans les franges les plus radicales de ces partis, de ce fait les tendances réactionnaires et révolutionnaires de ces partis ne trouvent pas leur espace, qui se double du fait que leurs franges réformistes se distinguent mal : en phase électorale, les partis intermédiaires radicalisent leurs discours et font des promesses qu'ils savent ne pas pouvoir tenir ; en phase de gouvernement ils sont dans une perpétuelle tension, leur action est convergente, leur discours public informel reste assez radical, leur discours en fonction correspond à leur pratique, de ce fait la gauche apparaît trop à droite, la droite trop à gauche pour leurs partisans, à quoi s'ajoute une dissonance supplémentaire, les franges radicales ont un discours radical lors des débats et un comportement réformiste lors des décisions. Les temps sont mûrs pour restaurer le groupe manquant, celui central, disparu depuis la fin des années 1970, après un lent dépérissement entamé vers 1955 et achevé vers 1980.

On peut dire que le destin permanent de ce groupe central est de disparaître puis de renaître cycliquement. Bien que je n'apprécie pas trop cette conceptualisation de la politique en terme de gauche et de droite, je vais faire avec. On peut dire que la société alterne les moments où elle est “tournée vers la gauche” et ceux où elle est “tournée vers la droite”. En fait, peu importent les termes, on peut dire l'avant et l'arrière, le haut et le bas, le passé et le futur, l'idéal et le nominal, le métaphysique et le physique, pour notre époque c'est la droite et la gauche. Perso, je préfèrerais parler d'est et d'ouest ou, comme pour le titre de mon autre site dynamique, périhélie et aphélie, probablement parce que je suis un amoureux du soleil et que ces termes réfèrent à lui, pour l'est et l'ouest vous connaissez, la périhélie est le moment où la Terre est le plus près du soleil, l'aphélie celui où elle en est le plus loin, tel que ceci :

Périhélie et aphélie

Pourquoi je n'apprécie pas la symbolique gauche-droite ? Elle ne rend pas compte de ce qui se passe symboliquement. Le moment “de gauche” est censément un moment de progression, celui “de droite”, et bien, de régression. Raison pourquoi les termes en rapport au soleil me conviennent mieux, perceptivement ça donne plus cette idée d'ascension ou d'amélioration, de descente ou de détérioration, dans l'hémisphère nord la périhélie correspond au passage de l'hiver à l'été, l'aphélie, de l'été à l'hiver. Remarquez, ça n'a pas tant d'importance que ce soit l'inverse dans l'hémisphère sud, importe surtout ce double mouvement hiver-été, été-hiver. Puis de toute manière c'est symbolique, les symboles n'ont pas nécessité à se calquer sur la réalité physique, au contraire. Bon, on dira gauche et droite.

Finalement non, on dira périhélie et aphélie, ça me semble le meilleur modèle, et on dira est et ouest pour les cycles longs, où chaque phase intermédiaire est “une journée”. Un cycle est une sorte d'année, avec ceci cependant que selon le groupe social auquel on se rattache (je parle ici des groupes correspondant à la société vue comme un organisme, la tête, le tronc, etc., voir les pages là-dessus, je ne sais plus trop desquelles il s'agit, elles sont dans la liste des articles), et bien, on est “au sud” ou “au nord”, je veux dire, pour tel groupe la périhélie correspond à l'hiver, pour tel autre, à l'été, ce qui est logique : quand par exemple le groupe “la tête” est à son optimum un des groupes “les jambes” est à son plus bas, donc l'un “en été”, l'autre “en hiver”. Par contre, pour les deux groupes la distance au soleil est là même à cet instant, donc l'un est au nord, l'autre au sud. Je vais radoter, tout ça est symbolique, effectif mais symbolique, ne pas trop attacher d'importance à la description métaphorique ou métonymique, c'est juste pour mieux se représenter les choses. Et en parlant de ça, on peut se représenter schématiquement un cycle ainsi : selon le modèle latéral, le groupe central émerge au points extrêmes, qu'on dira les solstices, et domine durant la phase qui va du solstice au prochain équinoxe, puis régresse de cet équinoxe au solstice suivant ; durant la phase qui va du solstice d'hiver à l'équinoxe de printemps le groupe central est orienté à gauche, durant la phase de cet équinoxe au solstice d'été la gauche prend de l'importance aux dépens du centre mais connaît des troubles de plus en plus importants ; après le solstice d'hiver le centre reprend de l'importance, mais orienté à droite, et toute la suite mais à droite cette fois, donc. Mmm... Gauche, droite, vraiment ça ne me va pas... Bon, je vais prendre une autre comparaison, je vais parler en terme de points cardinaux. On dira que pendant la phase hiver-été, la société est orientée vers l'est (ce qui va bien en ce cas puisque l'est c'est l'orient...) et durant celle été-hiver, vers l'ouest. Du fait, pendant une des phases, un bras et une jambe sont au nord, les autres au sud. Quelle que soit la phase, le bon côté est le sud, donc selon la phase les groupes latéraux favorisés ne sont pas les mêmes. L'orient est la direction du rêve, de l'imagination, de l'avenir, de l'espoir, de, que dire ? La bienveillance ? Oui, quelque chose de ce genre, ou alors de la confiance. Dans cette orientation, la jambe privilégiée est celle “artistique”, le bras, celui “diplomatique”. L'occident est bien évidemment celui de la réalité, de la raison, du passé, de l'absence d'espoir (qui n'est pas le désespoir, juste l'absence d'espoir), de la malveillance ou de la défiance. Et bien sûr, la jambe au sud est celle “scientifique”, le bras celui “militaire” (ou policier, disons, “de la force”).

Les perturbations en fin de demi-cycle sont prévisibles. L'hiver est le moment où une société connaît un plus bas dans ses ressources, l'été celui où elle connaît un plus haut. Or, les méthodes qui valent quand on est tourné vers l'orient sont coûteuses donc requièrent un assez haut niveau de ressources, ce qui explique les troubles, sur la fin : l'infrastructure est conçu pour une politique générale “de gauche” donc dépensière mais on arrive au bout de ses ressources, d'où la nécessité de faire une conversion, le '« corps [social] tourne ou tend à tourner en décrivant une courbe »'' autour d'un point ce qui dans les débuts crée une perturbation, le sud est au nord, le nord au sud, etc. Bien sûr, il en va à l'inverse dans l'autre demi-cycle, la société s'organise pour gérer la pénurie en attendant que les réserves commencent à se reconstituer mais à la fin de la période, l'infrastructure, qui est conçue pour une politique générale “de droite” continue en mode gestion de la pénurie alors que l'abondance est là, d'où les troubles sur la fin et la nécessité de faire une conversion, et les troubles consécutifs. C'est aussi pourquoi, aux solstices, le groupe central renaît et prend la direction de la société : quand tout est inversé, le seul segment de la société qui reste en place est celui qui est au centre, au milieu, qui est médian. En tout cela, une chose serait amusant si elle n'était source de problèmes graves, vers la fin de chaque demi-cycle la société a conscience de devoir opérer une conversion mais son organisation ne le lui permet pas, de ce fait elle tente de mettre en place des politiques inverses à celles qui fonctionnaient bien du solstice à l'équinoxe mais qui sont inapplicables du seul fait de l'inadaptation de l'infrastructure. Les gens s'en rendent compte, cela dit, et tentent donc de changer l'infrastructure, mais localement, et ça ne marche pas trop bien parce que, tut bêtement, la structure n'est pas modifiable par parties, c'est tout ou rien.

Je radote, je radote : ce n'est qu'une modélisation, dans les faits les changements ont bien lieu et fonctionnent, mais d'une manière approximative et précaire, la structure ayant une tolérance au changement assez limitée : tant que les modifications sont secondaires, locales et discrètes, ça va à peu près ; dès qu'elles gagnent en succès, soit elles sont bloquées, soit elles sont absorbées et modifiées par la structure, et du coup fonctionnent encore moins bien pour un coût plus important. Dans les faits aussi, mais de cela je parle plus dans d'autres pages, durant la phase équinoxe-solstice l'infrastructure de la phase suivante se met en place en donnant l'apparence de se conformer à l'infrastructure actuelle. Raison pourquoi la conversion est rapide : le système ancien est inactivé, celui nouveau dépouillé de, disons, les caches qui lui donnent une apparence de conformité au normes en cours et se met aussitôt à fonctionner selon ses propres normes. Bon, il faut mesurer les choses, “conversion rapide”, “immédiatement”, c'est manière de dire. Dans le cas d'une petite société, quelques milliers ou au plus quelques dizaines de milliers de membres, ça peut en effet être très rapide, on peut dire (ce qui est à la fois vrai et faux) que les membres de la société subissent un conditionnement qui fait que, recevant un signal déclencheur, ils vont “aussitôt” « opérer leur conversion individuelle », ce qui est le cas quelle que soit la dimension de la société, par contre pour une société très large “immédiatement” n'a pas vraiment le même sens, ça prend un certain temps, en fait. Exemple, moi : on peut dire que j'ai récemment été “activé”, pas proprement converti, je suis un converti de longue date, je dirai même, de naissance, mais j'ai été conditionné pour ne pas le faire paraître. Une sorte de taupe. En fait, ça n'est pas ma première activation, c'est la troisième. Les deux premières étaient une sorte de rodage, du le fait que l'activation n'est pas une chose très simple, une taupe n'est une bonne taupe que si elle l'ignore l'être, ce qui implique que son activation va la désorienter, et de fait ça m'a désorienté.

Le phénomène de l'activation, dans un cas de ce genre, provoque une augmentation soudaine du niveau d'activité, selon le modèle psychologique et psychiatrique de ce qu'on nomme désormais « trouble bipolaire » on peut appeler ça une phase maniaque, on devient volubile, très actif, “lucide”, ironique, plaisant parfois, déplaisant d'autres fois et, pour mon cas, je me mets à écrire, écrire, écrire... Outre la désorientation initiale, et bien, ça a un coût, un coût énergétique. La conséquence prévisible est une phase dépressive, après l'hyperactivité, l'hypoactivité. On peut dire que mes deux précédentes activations ont eu trois buts : ne plus être aussi désorienté la fois suivante ; mieux diriger mon hyperactivité ; mieux gérer la dépense. Par exemple, changer de régime pour mon alimentation. La toute première activation, je me suis nourri comme auparavant et du coup je me suis assez vite trouvé en quasi-situation de sous-alimentation, je puisais dans mes réserves et perdais du poids comme jamais, et comme au départ je n'étais pas trop épais, ça eut vite des conséquences sur mon état physique et mental. La deuxième fois, j'avais pris du poids, spécialement en graisse, du fait j'ai pu puiser plus longtemps et à moindre conséquence dans mes réserves mais bon, ça n'a pas duré tant et j'ai de nouveau subi une dépression de presque deux ans. Cette fois, je n'ai pas commis la même erreur, je me nourris beaucoup plus et plus diversement, du coup je me maintiens en poids malgré mes dépenses. Revenons à la situation générale.

Le cas actuel est inédit, il s'agit de convertir l'humanité entière. Enfin non, ce n'est pas strictement inédit, c'est arrivé plusieurs fois déjà mais jamais de cette manière. Ouais, en écrivant je ne peux m'empêcher de me dire que je raconte des idioties, chaque conversion est inédite, donc pour chacune ce n'est “jamais de cette manière”. Chaque conversion “orientale” ou “de gauche” vise à étendre l'espace de la société, à y inclure un plus grand nombre de membres, et ça se fait, je l'expose plus précisément dans d'autres pages, en améliorant les capacités de communication de la société. Le caractère proprement inédit de la conversion en cours est que la société concernée est donc l'humanité entière. Jusqu'ici, quand une société était, disons, convertible, elle pouvait le faire sans trop s'occuper de savoir si oui ou non une large majorité de ses membres était préparée à la chose, du moment qu'une part suffisante de ses membres l'était, s'il apparaissait un peu trop de “non convertissables” et bien, ça n'était pas trop gênant, on les invitait à partir voir ailleurs, on les y aidait, même, en se disant qu'au pire ils vivraient leur vie selon les normes anciennes, au mieux ils tomberaient sur des sociétés convertisseuses et ça leur serait profitable, ainsi qu'à leur société mère, qui pourrait profiter de leur découvertes. Quand il s'agit de convertir toute l'humanité, il n'y a pas moyen de faire ça, il n'y a pas d'ailleurs, pas d'extérieur, donc le taux de non conversion doit être très bas, s'il y a trop de membres de la société désorientés, ils vont, disons, “lutter contre l'ennemi”, c'est-à-dire n'importe qui. Devenir des terroristes. Et ça n'est pas un mince problème, d'avoir une personne qui soudain se sent “en terre étrangère” et “cernée par des ennemis”, et se trouve au volant de sa voiture ou de son camion, on a pu voir ça ces temps derniers. Raison pourquoi il doit y en avoir le moins possible.

Comme évoqué ici, développé dans d'autres pages, on a obtenu il y a quelques temps de faire que toute l'humanité est reliée de telle manière que tout humain est proche de tout autre humain. Pas strictement toute l'humanité mais une part très importante de celle-ci. Le tout dernier élément qui a permis, au cours des trois derniers lustres, d'étendre beaucoup cette interrelation, est bien sûr le téléphone portable. Le risque n'est cependant pas dans les zones hors du réseau mondial de télécommunication, je veux dire, les boschimans qui vivent dans les espaces désertiques d'Afrique australe, les Aborigènes d'Australie ou de Nouvelle-Guinée qui ont des contacts sporadiques avec les autres sociétés, les Amérindiens qui mènent une vie “ancestrale”, ne sont pas un danger, ils vivent leur vie, assez indifférents de la notre, qu'ils ne méconnaissent pas mais qui ne les intéresse pas. Le risque est ici, dans cette société mondiale interconnectée, c'est là que les “non convertis” sont problématiques. Comme nul ne l'ignore je pense, le terroriste-type n'est pas un étranger qui pénètre la société pour y semer le désordre, c'est un local, mais un local qui se sent lui-même étranger dans sa propre société. Après la conversion, son sentiment sera encore plus fort, et en plus il sera exact, cette fois, puisqu'il sera plongé dans une autre société. Le paradoxe sera que la société sera à la fois la même et une autre, c'est ça qui désoriente au début. Sauf que pour les non convertis, au lieu de se réduire, cette désorientation augmentera avec le temps.

J'ai comme dans l'idée de n'avoir rien à ajouter. Ah si ! Les gens de mon genre sont des, que dire ? Des “bons samaritains”, toujours prêts à aider. Mais aussi des juges, toujours prêts à séparer le bon grain de l'ivraie. Aussi pacifiquement que possible mais parfois ça n'est pas possible.


1. Pour rappel, il ne s'agit que de modèles qui rendent compte d'un processus général, non d'une assimilation de ces sociétés aux virus et aux bactéries, en outre les choses ne sont pas tout d'une pièce, ça décrit des tendances, tenant compte que toute société humaine est à la fois “virale” et “bactérienne”, avec une dominante d'un de ces types pour chaque société.
2. Remarquez que, tout en n'adhérant pas au concept, je ne nie pas sa possible effectivité, mais pour ça il y faut un contexte favorable. La question est celle de l'adhésion d'un nombre significatif de membres de la société à un concept qui fait que, dès lors qu'une personne est déterminée comme la “réincarnation” d'une autre personne, et bien, elle le devient. Rien de mystérieux ici : quand une large part des personnes entourant cette personne partagent cette croyance, d'une part elle vont lui « injecter son âme », elle vont lui fournir inconsciemment les éléments biographiques et comportementaux qui signent le caractère de la personne censément réincarnée, de l'autre elles vont « chercher les signes » qui confirment cette réincarnation, et elles les trouveront... Pour un autre cas, une personne de ma famille, qui a assez longtemps vécu au Brésil en immersion dans la culture locale a été, à un moment, “chevauchée” (possédée, dit-on aussi) par un des orixás du candomblé, sans pourtant adhérer elle-même à ce rite, on peut appeler ça “imprégnation culturelle”. Soit précisé, ça ne lui est pas arrivé en dehors du Brésil, c'est vraiment une question de contexte.
3. Ne pas oublier que cette histoire d'élimination des juifs va bien au-delà des juifs stricto sensu, le but proclamé du parti nazi fut de « désenjuiver » la culture allemande, le christianisme étant conçu comme un « enjuivement » – ce en quoi il n'avaient pas vraiment tort, de fait le christianisme dérive d'une secte juive et en a conservé l'essentiel, où ils avaient tort, c'était dans la possibilité de réaliser ce qu'ils visaient. Malheureusement, leur tentative a fait beaucoup de dégâts avant d'échouer...
4. En plus précis, entre 1917 et 1932 mais la précision compte peu, les choses n'apparaissent pas tout soudain pour se réaliser immédiatement, c'est un processus, la révolution russe se prépare depuis au moins 1905 et plus concrètement depuis 1914-1915, s'achève dans sa phase initiale entre 1992 et 1925, de même l'Allemagne nazie se prépare depuis le début de la décennie 1920, commence à se concrétiser en 1929, se réalise en 1936, 1917 et 1932 étant le signe formel, la “prise de pouvoir”.