Les trois pierres de fondement de la socialisation sont celles de la devise républicaine en France, liberté, égalité, fraternité. Comme dit dans plusieurs textes on aurait avantage à utiliser un autre terme que fraternité, je propose adelphie, qui vaut ce qu'il vaut mais à l'avantage de désigner notre réalité, les adelphes sont tous les enfants d'une même mère et dans de plus en plus de sociétés la citoyenneté s'applique à tous sans distinction de race, de religion, de classe, d'origine, de genre, etc. Bref, tout membre des sociétés actuelles d'une part toujours plus grande d'entités politiques en est citoyen à la naissance ou suite à une procédure quelconque de naturalisation. Jusqu'à récemment, pour être précis, jusqu'à la fin de la deuxième guerre mondiale, la règle générale était de réserver la citoyenneté à une part limitée des membres de la société, les autres membres étant au mieux des sujets, sinon des biens meubles ou immeubles, souvent les deux en même temps. En France par exemple, en 1944 la quasi-totalité des membres de la société étaient des sujets ou des biens, après cette date toutes les femmes appartenant à des familles de citoyens devinrent des citoyennes, mais ce n'est qu'à la fin de l'empire colonial français que tous les Français restant devinrent des citoyens, les anciens sujets prenant leur indépendance et accédant à une citoyenneté nouvelle ou, selon les cas, devenant sujets d'autres entités politiques. Bref, le troisième terme, qui s'applique à la situation antérieure où seuls des hommes dits libres pouvaient accéder à la citoyenneté, n'a plus de validité depuis 1944 formellement, 1962 effectivement. D'où ma proposition d'user à sa place du terme adelphie.
La seule particularité de la France dans cette histoire est d'avoir énoncé cette devise, ces trois fondements sont aussi anciens que le sont les sociétés humaines. Factuellement, pour se constituer et se perpétuer une société ne peut se passer de liberté, d'égalité et d'adelphie, ce qui change de l'une à l'autre est la proportion et la priorité qu'elles leurs donnent. On peut dire qu'un complot a pour dogme principal de mettre en avant l'égalité ou l'adelphie, voire la fraternité, de minorer les autres et de postuler que la liberté est une conséquence de l'adelphie ou/et de l'égalité. Treize variantes, donc, telles que :
1 Liberté > Égalité > Adelphie
2 Liberté > Adelphie > Égalité
3 Égalité > Liberté > Adelphie
4 Égalité > Adelphie > Liberté
5 Adelphie > Liberté > Égalité
6 Adelphie > Égalité > Liberté
7 Liberté . Égalité > Adelphie
8 Liberté . Adelphie > Égalité
9 Égalité . Liberté > Adelphie
10 Égalité . Adelphie > Liberté
11 Adelphie . Liberté > Égalité
12 Adelphie . Égalité > Liberté
13 Liberté . Égalité . Adelphie
13 Liberté . Adelphie . Égalité
13 Égalité . Liberté . Adelphie
13 Égalité . Adelphie . Liberté
13 Adelphie . Liberté . Égalité
13 Adelphie . Égalité . Liberté
Les flèches indiquent un rapport de dépendance ou de causalité, les points un rapport de complémentarité ou de corrélation. La présence de six variantes numérotées 13 pour indiquer qu'ici l'ordre des mots n'importe pas, tandis qu'il importe dans les autres cas, y compris ceux où au moins deux de ces éléments sont formellement corrélés, dès lors que l'un est perçu comme de moindre valeur les deux autres ne peuvent être vraiment corrélatifs, les classements hiérarchiques induisent une hiérarchie entre toutes réalités ou tous concepts. Entre tout. La principale différence entre les cas 1 à 6 et les cas 7 à 12 est que si l'on doit établir une priorité, dans les six premiers cas elle est toujours la même, dans les six suivants elle est en partie dépendante du contexte, tandis qu'elle est toujours dépendante du contexte dans le treizième cas. On peut aussi employer “autonomie”, “subsidiarité” et “solidarité”. La Grande Querelle qui traverse les temps est précisément la relation entre ces éléments, savoir s'ils sont corrélatifs ou en rapport de dépendance, et dans quel ordre. On comprendra qu'un projet de société basé sur un dogme qui postule que de la liberté découle l'égalité et de l'égalité découle l'adelphie, n'aura pas les mêmes priorités que celui qui pose que de l'égalité découle la liberté et de la liberté découle l'adelphie.
Les complots, il y en a de deux sortes, ceux qu'on dira spontanés et ceux prémédités. Ils ont tous pour cause un des douze cas qui supposent une inégalité, une causalité. Ces cas n'ont pas tous les mêmes conséquences, certains contribuent plus fortement à la désocialisation, à la fin d'une société et sa déliquescence ou sa transformation en autre chose, en une société autre qu'humaine ou en autre chose qu'une société.